C'est tendance, bien entendu ! Les concepts d'un côté et de l'autre prennent aussi l'ascendance sur nos poussièreuses généalogies, en attendant une fulgurante descendance ... Et le machinwashing fait partie de la tendance.
Cette notion, très utilisée par les grandes marques pour se targuer, par exemple, de plus d'écologie, c'est le greenwashing, un mea-culpa de la si précieuse communication d'entreprise ; et elle me donne l'impression de conquérir la généalogie. Certes nous n'en sommes pas encore au cassoulet certifié généalogie 221F parce que c'est la recette officielle des ancêtres du traiteur local, mais ... les débuts sont prometteurs et l'on voit quelques généalogistes, des associations, des sites web orner leurs devantures de nouvelles orientations, toutes généalogiques, et pour le plus grand bien de tous, nous accédons au généawashing.
Le moindre prétexte à inclure la généalogie dans le moindre interstice culturel, historique, éducatif etc. où il fera le plus grand bien à tous, petits et grands, et surtout à son créateur qui se targuera d'une mission certes pas divine, mais pas loin, est déjà bien en place.
Le généawashing traite ainsi de tout et passe à la moulinette du blanchiment un vaste ensemble de domaines qui font la richesse de cette discipline. Nous les avons déjà évoqués : histoire, onomastique, géographie, ethnologie etc. Ainsi si tout est prétexte à faire de la généalogie, tout ne devient pas généalogie et cette miraculeuse machine à laver, et souvent à déteindre, le linge de nos ancêtres ne doit pas nous faire transformer notre passion en une paranoïa aveuglante. J'avais déjà évoqué cette attitude lors d'un article à propos de ce que l'on nomme "Tunnel vision" chez les gamers (*).
Si nous justifions toute nos actions et nos positions autour de la généalogie, nous finirons par ne plus voir, comprendre, appréhender ce qui se passe autour de nous. Nous le savons, nombre de nos interventions généalogiques nous transportent dans des champs de connaissances qui parfois sont loin d'une simple question de parenté. Sachons alors nous y acclimater, nous y intégrer, écouter et en retirer ce dont nous avons besoin. Évitons l'appropriation et la transformation en collant par dessus la devanture l'étiquette "Généalogie". Sachons rester généalogistes dans l'esprit de notre passion et transformons nous en historiens, côtoyons des ethnologues, fondons nous dans la masse des écrivains et ajoutons toutes les cordes possibles à notre arc.
Je ne dénigre pas ces actions qui, ces dernières années, ont abreuvé nos circuits de communications, puis nos forums, discussions, salons généalogiques de France et de Navarre, plongeant un grand nombre de généalogistes dans des quêtes Graalesques. Toutes ces initiatives finissent par apporter beaucoup à la discipline, mais souvent elles détournent le généalogiste amateur qui, ne sachant plus à quel saint se vouer, ni sur quel chemin retrouver Rome, adhère à un généawashing moins par conviction que par le sentiment de faire quelque chose de bien. Une attitude qui explique pourquoi un si grand nombre de débutant abandonne la généalogie.
Je ne laverai donc pas plus généalogique que ce que je le fais déjà ! Point besoin de me justifier en accolant à toutes mes expériences le slogan "La généalogie avant tout !" Je ne me lancerai pas dans des considérations éducatives, pédagogiques, psychologiques sur l'intérêt et l'importance de la généalogie appliquée à de tierces personnes.
Et finalement, faire un repas avec des collègues généalogistes sans jamais parler généalogie, ça a vraiment du bon !
(*) En relisant quelques courriers généalogiques, je me suis pris à comparer certaines demandes avec le phénomène "tunnel vision" constaté chez les adeptes du jeu vidéo.
Certains jeux vidéo demandent une vision de caméléon, si possible donc avec les deux yeux asynchrones !, afin de pouvoir percevoir le moindre changement, le plus infime déplacement dans n'importe quel coin de l'écran, afin de parer aux moindres éventualités de jeu. Or, beaucoup de joueurs focalisent sur l'action principale, oubliant donc de regarder ce qui se passe ailleurs ; c'est ce qu'on nomme la "tunnel vision". Le bon joueur essaiera donc de développer ses aptitudes à capter le maximum d'informations autour de lui.
J'ai donc retrouvé des courriers m'y faisant penser. C'est un peu dans le style également de la fameuse réplique de César à M. Brun, quand il lui demande s'il a vu l'Andolfi à Paris.
Quelques américains en sont des spécialistes et me demandent, parce que j'ai fait des recherches en Sicile, et plus particulièrement à Trapani, deux informations qu'ils "tunnelisent", et donc oublient, sur des ROMANO, si j'en connais à Turin ! Il est vrai que la vision américaine de l'Europe ne correspond pas à la nôtre, ils voient plus un état comme le Texas dans notre bon vieux continent ...
Mais c'est également vrai pour nombre de généalogistes qui envahissent les forums, les courriers électroniques à la seule évocation d'un nom qui fait partie de leur généalogie, sans prendre en compte les informations connexes. Certes si j'évoque CHANCEL de la FUMERIE de SAINTE-SOPHIE-EN-CALVADOS, il y a de fortes chances que vos ancêtres portant le même patronyme soient aussi les miens. Par contre, beaucoup de patronymes sont courants dans toute la France, des MARTIN, en tête des classements, aux BOULANGER, GERMAIN, GILLES etc ... Sans prendre en compte les informations de dates, de lieux, de contexte général, c'est un peu comme essayer de trouver une épingle dans une botte de foin !
Je conseille alors vivement aux futurs questionneurs d'éviter cette "tunnel vision" et de ne pas focaliser sur le nom en élargissant leur vision, à minima, au lieu et à la date évoqués. Et si ces derniers ne sont pas mentionnés, il est bon d'en faire la demande de précisions, au moins "autour de " ou "environ vers".